L'ESSENTIALITÉ


Jasmine Cyr Gagné, 7 jours, 2 ans


Ce que nous entendons par l'essentialité, c'est un changement radical de point de vue sur tout ce qui touche de près ou de loin la spiritualité. Les religions ont depuis toujours mis l'accent sur un Dieu extérieur au Soi, sur la projection d'un être suprême, escortée par tout un cortège d'intermédiaires appelés: prophètes, saints, prêtres, religieux, pour ne citer que ceux-là. Ces derniers ont formulé sur terre un nombre incalculable de croyances, de rituels, de prières, de valeurs, tout aussi bizarres d'une religion à l'autre.

Qui plus est, tous les mouvements spirituels génèrent des égrégores qui, à leur tour, adombrent les chefs spirituels et les membres. Cela a pour effet de polariser l'espace intérieur de tous les fidèles, dont la plupart n'osent plus se référer à leurs propres pensées. L'escroquerie de la religion est donc d'éluder la conscience de manière à l'empêcher de réaliser le Soi.

En âme et conscience, nous sommes tellement fixés sur Dieu, sur le Seigneur, sur une déité projetée, nous sommes tellement préoccupés à satisfaire tant d'activités accessoires: rituels, prières, lectures, croyances, obligations, travaux, que nous ne devenons jamais vraiment conscient de notre Êtreté au-delà de tout ce formatage spirituel. Les activités religieuses ou spirituelles ne peuvent, autant que faire ce peu, qu'apporter un baume à la souffrance due à l'isolement de notre conscience de sa contrepartie Supérieure.


L'essentialité met le mental au repos et interpelle la conscience de manière à ce qu'elle retourne toute l'attention sur elle-même avec comme questionnement ultime: qui suis-je? Le fait d'aller constamment dans la direction du «je suis», sans essayer de le définir, nous amène à redécouvrir notre état d'innocence hérité à la naissance. En venant au monde, notre conscience est mise à neuf dans son état de Luminosité native, sans identification, sans pensée, sans langage, sans connaissance, sans identité et sans égo. Vue depuis le mental et la personnalité, cette conscience à l'état pur fait office de néant.

Toutefois, le fait qu'il n'y a pas de mémoire ou de pensée active n'est pas un signe d'inconscience. Même à l'intérieur de nos trous de mémoire, n'avons-nous pas la conscience d'exister, d'être toujours présents? Chez l'enfant, le regard extrêmement présent n'est-il pas un signe de conscience active? (Observer à nouveau la photo au début de la page)

À mesure que l'enfant grandit, une distanciation s'établit entre lui-même et le monde extérieur: le «je», le «moi» ou l'égo va émerger naturellement. À cet égo, vont se greffer, avec le temps, toutes sortes d'appropriations, voire sa mère, son père, son corps, ses possessions, son image, son apparence, ses sentiments, ses amours, ses pensées, ses opinions, sa profession, ses titres, son conjoint, ses enfants, enfin son parcourt de vie.

L'effet combiné de toutes ces projections va détourner graduellement la conscience de son innocence de manière à ce qu'elle s'identifie totalement à tous ses attachements. C'est de cette façon que nous nous bâtissons inconsciemment une personnalité sur le besoin de se renforcer, s'affirmer, et ce, dans le détournement, puis dans la négation de notre Essence première. Voilà donc le lent départ vers la dualité responsable du vide intérieur qui nous habite.


Le mouvement vers l'essentialité aura donc pour rôle de déconstruire les personnages bâtit avec le temps de manière à ce que l'on recouvre notre état originel qui a toujours demeuré là, mais masqué par tant de voiles, de projections, de masques et d'identifications éphémères. À défaut d'aller à l'essentiel, la vie n'est que recherches d'illusions et de satisfactions passagères, que quêtes spirituelles propulsées par un vide intérieur croissant qui, encore une fois, ne repose que sur le détournement de notre conscience vers l'extérieur.

Le mouvement vers l'essentialité ne demande pas d'abandonner travail, responsabilités, femmes et enfants. L'essor sera cette fois entièrement intérieur et dans le quotidien. Nous parlons de désidentifications de la personnalité de façon à recouvrer notre simplicité, notre humilité et notre transparence de l'enfance.

Ramener à la conscience les premiers moments d'Unité de notre petite enfance a bien plus d'incidences sur notre Psychée que toutes formes de spiritualité axée sur les croyances et les cérémonies. N'a-t-il pas été dit: «À moins de devenir comme un petit enfant, vous ne pourrez entrer dans le Royaume des Cieux».


Pour effectuer ce retournement vers l'essentialité, nous n'avons même pas besoin de savoir qui nous Sommes. Il suffit de découvrir, par un exercice d'enquête sur soi-même, ce que nous ne Sommes pas: «je ne suis pas ceci, je ne suis pas cela.» Le seul fait de se distancer et d'observer constamment notre corps, nos pensées, nos sentiments, nos pulsions, nos angoisses, nos maladies et tout ce qui nous vient à l'esprit, démontre bien que nous ne sommes pas ce que nous observons. Il ne restera à la fin plus rien d'autre que l'observateur lui-même, ci-après appelé le Soi.

Cet exercice d'enquête intérieure et de réfutation de ce que nous ne sommes pas aura comme effet bénéfique de renforcer, avec le temps, notre position d'observateur tout en démantelant les échafaudages de notre personnalité illusoire et encombrante. Voilà donc la clé menant à la libération et à la transcendance de l'esprit sur la matière.

En poussant à la limite la réfutation de tout ce que nous ne sommes pas, cela aura comme résultante de libérer la pensée des lourdeurs psychologiques du passé, de repositionner la conscience dans le moment présent tout en la rendant immobile. Par ce remarquable jeu divin, nous apaisons graduellement le mental de manière à atterrir, par la pratique, sur les rivages au silence intérieur.

La vie continuera d'être une succession d'évènements avec la différence, cette fois, que nous observerons le spectacle avec détachement, alors que d'autres adhèreront aux évènements et se déplaceront avec eux.


Si besoin est de maintenir la notion de Dieu dans l'essentialité, définissons-le comme l'Absolu demeurant immobile au Centre du Grand Tout et également au Centre de tout ce qui existe. Dieu à la faculté de s'extérioriser ou de se projeter en une infinité de consciences qui n'ont de cesses d'explorer, d'agrandir et de parfaire ce vaste univers. Il est littéralement vrai que, quand le «Je Suis» se manifeste, l'univers apparait, le monde et le mental voient le jour.

Un peu à l'image de l'enfant prodigue qui sent le besoin de retourner chez son Père suite à un long désillusionnement, le réveil de la conscience à son Essence spirituel signe le retour à sa Source et à son Immortalité. L'essentialité n'a d'autre raison d'être que de rétablir ce qui a été oublié, le Soi, et ce qui a été perdu, l'Absolu.

Yvon Gagné


Les croyances sont des armes de destruction massive de la Vérité.
Retourne donc à ce que tu Es, à l'Essentiel.
Tu ne seras jamais aussi près de Dieu.


Toute quête spirituelle est une méprise. Nous ne pouvons
chercher ce que nous Sommes, car nous
Sommes ce que nous cherchons.