LE PIÈGE DES RELIGIONS



INTRODUCTION

À titre de comparaison avec la religion, la philosophie est une discipline de questionnement, de réflexion sur le monde et de l'existence humaine. Elle traite souvent de la relation de l'homme avec l'univers tout en conservant un esprit critique, comme quoi, rien n'est parfait en ce bas monde. Après tout, la philosophie essaie de concilier la science et la spiritualité dans une sorte de synthèse cosmologique.

Ce qu'il y a de particulier chez les grands philosophes est qu'ils établissent une distanciation entre eux-mêmes et leurs idées de manière à élargir leur conscience. Ils évitent ainsi de pénétrer dans un effet tunnel où la vision périphérique se referme sur peu de choses. Ils ont donc des électrons libres dans le sens le plus noble du mot.


L'EFFET TUNNEL

Ce qui est une vertu chez les uns peut être une calamité chez les autres. Les religieux s'investissent aveuglément dans leurs croyances. Ils s'appuient sur des enseignements séculaires élevés au rang de révélation. Cela crée ce qui est appelé l'effet tunnel, réduisant à une seule moralité toute forme de pensée, toute réflexion, toute analyse, toute autocritique personnelle. C'est cette étroitesse d'esprit qui amène les religions à se croire infaillibles.

Cela explique pourquoi les chefs religieux deviennent si dogmatiques, autoritaires et générateurs de dualité. Toute la problématique, pour éviter de parler de dangerosité, réside donc en amont de leurs fondements, responsable de l'absence totale d'autocritique sur la teneur morale et spirituelle de leurs écritures. Quant à l'interprétation, c'est la loi du plus fort.


L'EMPRISE

Un marqueur vraiment évident permettant de bien identifier les religions extrémistes est l'omniprésence du ciel et de l'enfer comme prolongement des moindres pensées et gestes de la vie courante. De surcroit, leurs techniques de radicalisation exhortent chacun à s'identifier totalement à leur religion, à leur culture et à leur déité extériorisée, à défaut de les considérer comme des personnes à part entière.

Pour les nouveaux adhérents, on passe de la courte phase de séduction à la déconstruction de la mémoire, de la pensée et de la conscience individuelle. Ayant ainsi perdu tout repère, toute singularité, la personne est instrumentalisée et prête à faire tout ce qu'on lui demande.

Il existe bon nombre de moyens de pratiquer l'esclavage. La force et la brutalité sont les plus utilisées par les dictatures et les peuples dits civilisés. Mais la forme la plus insidieuse de soumission est celle pratiquée par certaines sectes et religions contemporaines. On attire les personnes en quête de sens par de grandes idéologies où chacun espère trouver un sens à sa vie à l'intérieur d'une belle fraternité.

Le mouvement tisse lentement sa toile autour d'un nouveau adhérant tout en le dépouillant mentalement, spirituellement, physiquement et financièrement. Une fois complètement coupé de son entourage familial et isolé socialement, il n'est plus rien. Il ne vit que par procuration. C'est la plus grande forme d'enfermement dont sont surtout victimes les femmes et les enfants.


LE CHARME DES ÉGRÉGORES

Il est rare que la quête de sens débouche sur la joie et la liberté. La raison est fort simple. C'est que l'on oriente notre recherche vers quelque chose qui est extérieur à nous-mêmes. Nous sommes que trop souvent séduits par des égrégores impressionnants et structurés, par des rituels époustouflants, par des lectures séculaires dites sacrées, et pour terminer, par des vies programmées et moralisées dans les moindres détails. Il semble que plus les choses deviennent sophistiquées et hiérarchisées, plus elles séduisent les ego spirituels. Dans toute cette mascarade, chacun s'éloigne de son Soi, de son intimité, de son silence intérieur et enfin, de sa liberté de conscience.

Tant que les pratiques spirituelles ne retournent pas la conscience face à elle-même, dans un seul à seul, tant qu'elles ne s'adressent pas directement au Soi, à la Source de ce que nous Sommes, les rites nous égareront éperdument dans des simulacres de vérité, dans des obsessions de pureté, d'obligations morales et de fausse sécurité.

Yvon Gagné


Pour réaliser le Soi, la Lumière intérieure n'a besoin d'aucune organisation
pyramidale, d'aucun intermédiaire, d'aucun maitre, pas plus qu'elle
n'a besoin d'aucune connaissance, d'aucune croyance, d'aucu-
ne tradition, d'aucun rituel, et à la limite, d'aucun modèle,
d'aucun exemple qui ont pour effet de figer ce qui
doit demeurer libre. Ultimo, la Lumière a juste
besoin du silence intérieur favorisant le
retour au Soi dans un seul à seul.