LA MÉDITATION
(Deuxième essai)

INTRODUCTION

Au début, la méditation génère une certaine réticence, voire une peur consciente ou inconsciente chez beaucoup de personnes, raison pour laquelle on remet toujours l'expérience à plus tard. D'où vient cette peur? Or, dans les tréfonds de la psychée humaine se tient un personnage mythique que l'on nomme le Gardien du seuil qui personnalise les recoins les plus sombres de la personnalité.

On fait donc référence ici à tout le marasme émotionnel refoulé par le passé, comme les intimidations, les humiliations, les souffrances, les chagrins et les dégoûts de toutes sortes. D'autres affolements s'ajoutent, comme la peur d'être seul, la peur de la mort, la peur du noir, la peur de disparaître, les dérisions religieuses et spirituelles, les superstitions, et pourquoi pas, la peur d'avoir peur.

LE GARDIEN DU SEUIL

Le Gardien du seuil est souvent représenté dans les récits et les légendes par une jeune fille symbolisant le Soi, entourée d'un dragon qui en protège l'approche. Le rôle du Gardien du seuil est donc d'interdire au mental ou à la pensée rationnelle d'accéder au Soi.

Dans une introspection, le Gardien du seuil peut surgir à tout moment sous forme d'angoisse ou d'appréhension, au regard intérieur de choses apparemment anodines. Il protège ainsi son territoire par des peurs, des pulsions, quand ce n'est pas des hallucinations. Force est de constater que pour accéder à des niveaux de conscience mystique, de même qu'au Soi, il y a un passage obligé à affronter silencieusement nos propres ténèbres.

L'APPROCHE DU GARDIEN DU SEUIL

L'aspirant à la méditation doit donc envisager ses propres épouvantes tout en évitant de les confronter directement. En tant qu'observateur, il conservera une certaine distance face à tout ce qui se déroule à l'intérieur de lui-même. Il regardera ses peurs pour ce qu'elles sont, c'est-à-dire des énergies négatives qui squattent en lui.

Depuis le Cœur, il émettra des vibrations d'amour et de Lumière, non pas directement vers ces énergies, mais les laissant émaner de lui-même comme une lumière dans une chambre obscure. Ainsi, tout ce qu'il observera de cette manière se dissoudra avec le temps par le simple rayonnement de la Lumière.

Il y a d'autres intervenants qui viendront perturber la méditation, comme le mental bâillonné qui étouffe dans un silence obligé, par besoin d'action et de distraction. Le Gardien du seuil mettra tout en œuvre pour saboter la méditation de manière à ce que l'on décide de passer aux choses concrètes. Il s'agit donc d'une frustration due au sevrage du mental, en plus d'une perte de contrôle du corps et de l'émission des pensées.

Voilà donc un puissant stratagème du Gardiien du seuil faisant office de grenade pour éloigner une conscience indiscrète de sa tanière. Seule la Lumière de l'Esprit peut transmuer cette expérience pénible en sérénité intérieure. Pour arriver à cette fin, il est donc suggéré de se définir des périodes de méditation régulières et de les respecter du mieux que possible.

LE SOI, LE CŒUR, LA PRÉSENCE

Après qu'un certain nettoyage ait été fait à l'intérieur de soi, on peut s'attendre à de belles périodes d'accalmie. Les moments de silence intérieur s'allongent sonnant le début de réelles expériences intimes et profondes. Il est bon de garder à l'esprit que le but de la méditation n'est pas vouloir Être, mais laisser Être, de réaliser le Soi. Être Soi, ne serait-ce quelques secondes, une minute ou davantage est déjà un exploit en ce monde trépidant. Combien de personnes passent leur vie entière en périphérie de leur Être intérieur?

Une fois le vide intérieur apprivoisé, on constate que la vacuité n'est pas le vide tant appréhendé. En fait, la conscience libérée découvre furtivement qu'elle n'est pas seule en cet espace désert, qu'il y a un Centre communément appelé le Cœur. Il ne s'agit pas du cœur physique, mais du Cœur spirituel. Rappelons que le Soi va avec l'éveil du Cœur, à l'éveil de la Présence donnant à vivre la renaissance mystique tant évoquée dans la sphère dite spirituelle.

Il ne faut pas s'attendre que le Soi va modifier radicalement notre vie de l'extérieur. Il n'y a surtout rien d'ostentatoire dans cette expérience. Ce qui change ici, c'est quelque chose de très profond qui entretient la verticalité de la conscience. Observation faite, le Soi n'adhère pas à ce qui se déroule au sein de l'illusion de ce monde. De surcroit, le passage du «je» au Soi dévoile ce que nous Sommes en cette vie en tant qu'identité réelle, dont rien ne peut être dit.

CONCLUSION

La méditation n'est pas un produit de notre civilisation érigée sur le faire tout en faisant abstraction de l'Être. La méditation n'apporte rien à notre personnage égotique, ne satisfait ni les instincts, ni émotions, en plus de retirer momentanément au mental tous ses moyens d'expression.

Toutefois, la méditation fait renaitre une dimension nouvelle dans le for intérieur appellé le Soi, voire un joyau de Présence n'appartenant pas à ce monde.

Dans ses moments d'alignement, le Soi participe à l'immobilité de la conscience étant à même à se fondre dans les espaces intermédiaires entre l'Éternel et l'éphémère.

Yvon Gagné

Silence rime avec évidence.